lettre à Ji en octobre 1988
Comme Lavesque est belle, en plein milieu de l'automne...
Je revois la maison, s'ouvrant au vent de la plaine, belle, fière et solitaire, je revois le rouge vif des arbres fruitiers que tu avais plantés, avec tant de plaisir et d'amour, et les rangs de la vigne, juste avant les vendanges, droits, alignés, passant du vert clair au vert foncé, un peu de rouille, de pourpre et de marron, et en bas, près du chai, des tonneaux retournés, prêts à remplir leur office... Le rituel des vendanges, je regrette de n'avoir pu le partager avec toi, durant ces années de vie commune, prise alors par mon travail.
Ces années d'amour se sont écoulées comme du miel : chaque jour, chaque matin, chaque instant que nous avons partagé, n'était que douceur et tendresse, joie et plaisir. Chaque matin l'Eden s'ouvrait à nous, avec le bonheur de se réveiller l'un contre l'autre, ou l'un dans l'autre.
Je n'ai pas souvenir de dispute, de désaccord. Nous nous aimions trop pour nous heurter; et je te le dis et redis : les journées se sont écoulées comme du miel : coloré, chaud, fluide, sucré...
Et nos éclats de rire... et toute cette communion, cette harmonie, cette fusion de nos corps et de nos âmes, qui fait que nous nous comprenions sans avoir à nous parler, toute cette passion passionnée, mais calme, sereine, ensoleillée.
Bien sur, même si aujourd'hui je ne dors pas toujours seule, et toi non plus... Ma pensée va souvent rejoindre la tienne, par une image qui me rappelle que... par un geste, par un mot, par un endroit, par un regard de notre fils... et au moment de la chaîne d'union...Il n'est pas de tenue où mon coeur ne rejoint le tien, et j'espère qu'en secret, en silence, et très fort, toi aussi tu as une pensée secrète pour nous, à ce moment là, mon amour, mon ami, mon frère ♥